Rencontre .
Crise sanitaire oblige, c’est par écran interposé que nous rencontrons Mario. Il a gentiment accepté de se prêter à cette première interview, qui se veut le prélude à une série d’autres, pour nous parler de son parcours, de ses créations et de sa vision du chant choral en général.
Qui êtes vous Mario, racontez vous.
Comme il aime à le rappeler, Mario est un musicien autodidacte. Dans son petit village natal, « il n’y avait pas d’école de musique ». Depuis toujours, il ressent un profond attachement à sa terre natale. Il ne perdra jamais son envie d’y rester pour y construire quelque chose … et cela tournera bien évidemment autour de la musique et plus précisément, du chant choral. Ses études, Mario les suivra à Pau – des études de direction de chœur. C’est là qu’il « apprendra à chanter » et à diriger, mais aussi à écrire. « J’ai toujours eu une oreille harmonique qui me permettait d’entendre plusieurs voix ». Très jeune, confronté à des chanteurs souhaitant eux-mêmes enregistrer leur 2e voix, il se lance dans l’écriture, pour d’autres. C’est notamment ainsi qu’il accompagnera le groupe Aritzak dans la création de nombreux disques aux harmonies jazz – « avec le classique, mes passions musicales ». Côté professionnel, c’est à Mario que l’on doit la création du département de musiques amplifiées des Landes, une autre de ses nombreuses facettes musicales. Mario a aussi une carrière de musicien globe trotter, il a fait de la musique Cubaine avec le groupe Fruta Bomba, de la musique Sud Américaine avec le groupe Mochicas et ses amis Jean Garin et Charles Diaz et de la musique traditionnelle Argentine au sein du groupe Mundo Nuevo avec Charles Diaz et Gorka Robles.
Votre collaboration avec KORUAK, racontez nous.
C’est l’équipe de Koruak qui m’a contacté avec en tête une commande de 3 pièces : une pour homme, une mixte, une pour femme. L’idée étant de profiter du festival KORUAK pour enrichir le répertoire et laisser le soin à chaque chœur de s’en emparer pour faire vivre et évoluer l’œuvre musicale. « Je me suis attelé à cette tâche. Côté création, il n’y a pas de règle. Parfois, j’ai une idée musicale et j’arrive à entendre les 3 ou 4 voix dans ma tête, il n’y a plus qu’à écrire. Je reconnais que c’est une chance. » Pour KORUAK, Mario, « pas assez Bascophone » s’est appuyé sur les textes d’Iker Robles. Il a trouvé l’inspiration à partir de 3 textes qu’il a mis en notes pour créer des pièces pour chœur. C’est maintenant avec impatience qu’il attend d’entendre ses pièces chantées en représentations. « Peut-être en 2021 ? Parce que voir (et entendre) chanter ce qu’on écrit c’est un énorme plaisir, c’est pour ça qu’on écrit ! »
Mais au fait, comment compose-t-on une telle pièce ?
« Une fois que la mélodie est là, il faut l’harmoniser. Et là c’est le savoir-faire, le travail de l’artisan qui commence. Autrefois, je faisais tout à la main, maintenant j’ai la chance d’être aidé par des logiciels qui permettent, dès que j’écris une note, de l’entendre. Mais le plus grand des bonheurs reste quand même celui de voir et d’entendre ce que j’écris, interprété. » “Et on constate une envie de la part des chef(fes) de chœur et des chanteurs de chanter de nouvelles choses. Plus il y a d’offres au catalogue, mieux c’est. ça enrichit le répertoire.” C’est aussi l’ambition du festival Koruak : participer à cet enrichissement tout en en se voulant un lieu d’échanges et de rencontres.
Pour clore cet entretien, nous avons posé 3 questions à Mario :
C’est quoi pour toi le chant au Pays Basque ?
« Une forte volonté culturelle d’exister, on n’imagine pas les basques sans chanter. Ce qui m’a toujours beaucoup surpris c’est la capacité de chanter à 2 ou 3 voix, spontanément. Ça se fait naturellement, ce qui veut dire que la culture du chant est suffisamment ancrée pour que les gens arrivent à faire de l’écriture spontanée. C’est une richesse patrimoniale tout à fait unique. Qu’on ne trouve pas forcément dans d’autres pays de tradition forte du chant. Au Pays basque, il y a une sonorité d’écriture qui est restée dans les mémoires. J’ai des souvenirs de chanteurs qui m’ont scotché comme Jean Michel Bedaxagar, que j’ai rencontré en Soule alors qu’il avait 17-18 ans, de Erramun Martikorena que j’ai connu lors de l’enregistrement de son premier disque en 78. Il y a aussi Beñat Axiari qui est encore un autre phénomène, il s’est associé avec de grands Jazzmen français, étrangers, des rappeurs. Il faut faire l’effort d’aller chercher son message, c’est tellement singulier, tellement fort, on ne peut pas passer à côté. » C’est un bonheur d’écouter ces voix.
Et en ce moment Mario, tu bosses sur quoi ?
« Je travaille l’harmonica chromatique qui est cet instrument qui se présente comme un harmonica mais qui a un piston qui permet de faire tous les demi-tons. Avec cet instrument, je travaille sur un répertoire de jazz en duo avec Arnaud Labastide qui est un ami pianiste de jazz. Je travaille aussi avec Maurine Grais une pianiste classique avec qui je fais des concerts qui sont malheureusement stoppés à cause de la crise sanitaire. Le répertoire de ces concerts mélangeait le classique et le jazz de Schumann, Bach, Ravel, Debussy à beaucoup de standards de Jazz. Le mélange piano Harmonica donne un mélange atypique un peu iconoclaste qui me plaît, dans lequel j’aime me retrouver.
Qu’est-ce que tu penses de KORUAK ?
Après avoir espéré pendant des années qu’il ait y un groupement de Chœur Basque de manière festive, un festival. J’ai été très heureux de cette initiative, je ne comprends même pas que ça n’ait pas été fait avant. Je suis ce festival KORUAK depuis le début, en tant que spectateur d’abord puis en tant qu’acteur. J’espère que ça va durer, et, en ce moment surtout, que ça va vite repartir. Les gens ont besoin de sentir cette force du chant basque polyphonique, de pouvoir y participer, qu’ils aient la sensation qu’il est à leur portée. Les premières éditions se sont faites avec beaucoup de sérieux ; et ça, ça me plaît aussi. »
Un grand merci à Mario Gachis pour sa disponibilité et sa gentillesse. Au grand plaisir de vous recroiser Mario.
L’équipe KORUAK.